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28 Jul 2022

Amener les scientifiques vers la démarche d’élaboration d’un plan de gestion des données - Compte-rendu de l’atelier RDA France des 18 et 25 mars 2022

Organisé par RDA France en 2022, l’atelier-webinaire Amener les scientifiques vers la démarche d'élaboration des plans de gestion des données invitait toute personne intéressée ou concernée par l’enjeu du plan de gestion de données (PGD) à partager questions, réflexions, retours d’expérience et suggestions. L’idée était de réfléchir de façon collective et ouverte à la manière dont on peut efficacement attirer l’attention des scientifiques sur les PGD pour qu’ils deviennent partie prenante de leur élaboration.

Le sujet est d’actualité dans le contexte de la science ouverte où de nombreuses structures mettent en place un support dans ce domaine, tandis que les chercheurs sont confrontés aux exigences croissantes de leurs établissements et des agences de financement. Le soutien à l’élaboration des PGD est aussi très présent dans les Ateliers de la Données qui démarrent dans Recherche Data Gouv. Il y a une réelle demande de réflexion et d’échanges sur la question dans la communauté, et plus de 150 personnes avaient manifesté leur intérêt pour l’atelier. Le nombre élevé de participants potentiels a conduit à organiser celui-ci sous la forme de deux sessions identiques. Plus de 170 personnes de profils variés se sont inscrites, dont les trois quarts ont participé à l’une des deux sessions. Les très nombreuses contributions des participants en réponse aux questions posées au fil de l’atelier ont permis de dégager des idées forces pouvant être mises à profit dans toute organisation ou collectif Ces réponses sont publiées dans un document complémentaire qui comprend les contributions anonymisées des participants. Le document est disponible en ligne après avoir été soumis aux participants pour qu’ils fassent connaître leurs éventuelles demandes de modification : https://hal-cnrs.archives-ouvertes.fr/hal-03739453, DOI : 10.18167/agritrop/00587.

Parmi les raisons de participer à l’atelier, le besoin de connaître des personnes confrontées aux mêmes interrogations et aux mêmes difficultés, de partager les expériences et de découvrir des initiatives, de nouvelles idées, de bonnes recettes, a été souligné. La participation de scientifiques à l’atelier était vue comme bénéfique: elle permettait aux personnes exerçant des fonctions support d’entendre le point de vue de ces scientifiques sur la manière d’aborder le sujet, pour comprendre les verrous au développement des PGD et pour réfléchir à la manière de lever les réticences et construire l’adhésion. Il s’agit de motiver et de mobiliser les scientifiques et les équipes de recherche, et de créer une dynamique autour des PGD. Ce travail peut être nécessaire à différents niveaux (projets, unités et même établissements), et l’hétérogénéité des situations (nature des données, partenariats, …) doit pouvoir être prise en compte.

L’attention des chercheurs peut être attirée sur les PGD en communicant, en sensibilisant, en informant et en formant, de même qu’en insistant sur les obligations liées au PGD et sur l’intérêt de celui-ci au début d’un projet, tout au long de celui-ci et après sa fin. La nécessité de s’organiser en groupes de travail ou en cellules ad hoc a été soulignée, de même que celle de proposer un appui à la rédaction ou à la relecture de PGD. L’identification de référents et la création de services support ont été également mises en avant. Les scientifiques ont de leur côté mis en avant l’obligation de produire un PGD dans le cadre des projets ANR ou européens et la sensibilisation via leur formation initiale ou par des sessions de formation, des présentations ou des séminaires. Certains des scientifiques présents ont d’ailleurs des missions spécifiques dans le domaine, dans le cadre de leur unité ou de leur établissement.

Parmi les solutions qui marchent, l’importance d’avoir un contact direct avec les scientifiques, d’argumenter, de répéter l’information, et surtout d’être positif dans la démarche tout en fixant des priorités a été mentionnée. L’intérêt de la sensibilisation au moment du montage des projets et de recourir à des ressources existantes et des cas d’usage a été rappelé, ainsi que l’utilité de pouvoir partager des témoignages. Disposer des compétences nécessaires est indispensable, de même que faire œuvre de pédagogie, accompagner et aider, y compris par la corédaction du PGD et l’aide à la documentation des données. Conditionner l’accès à une ressource (un entrepôt, un DOI, …) à la rédaction d’un PGD est aussi un moyen d’obtenir l’adhésion. Il faut montrer que la réflexion sur le PGD permet de faciliter et de rationaliser le cycle de vie des données.

La discussion pendant l’atelier a montré qu’il faut mettre en avant les bénéfices du PGD pour le ou la scientifique, son équipe et son projet. S’interroger dès le début d’un projet sur les données que celui-ci mettra en œuvre et la manière dont elles seront obtenues, gérées et partagées permet d’assurer que ces données resteront à la disposition du scientifique et du projet pendant toute la durée de celui-ci (même si elles ont été obtenues par un participant qui a quitté le projet) et pourront être réutilisées par l’équipe après la fin du projet, puisqu’on saura où elles se trouvent et qu’elles auront été correctement documentées. Par ailleurs, il est démontré qu’une recherche dont les données ont été partagées, par exemple en lien avec une publication, est plus citée, ce qui peut être un argument fort pour les scientifiques dans le contexte actuel de l’évaluation de la recherche. Ces arguments positifs ont été validés par les scientifiques présents à l’atelier.

Les difficultés restent nombreuses. On retrouve le manque de motivation des scientifiques pour une tâche qui est souvent vue comme une contrainte administrative de plus et la difficulté à les convaincre. Sont aussi signalés le manque d’exemples concrets, de sensibilisation et d’acculturation aux données dans certains domaines ainsi que la multiplicité des sources d’information disponibles sur les PGD. Le manque de temps, la lourdeur administrative, la complexité du PGD et le manque de compétences sont des points qui ont également été mentionnés à plusieurs reprises. Le besoin de connaissances sur les licences, les données personnelles et les données sensibles a été souligné, de même que les compétences disciplinaires nécessaires pour traiter certains aspects du PGD. Le fait de devoir décrire les protocoles utilisés en plus du travail sur les métadonnées est identifié comme un obstacle. La difficulté à formaliser un PGD dès le début d’un projet s’il reste figé a aussi été mentionnée, tandis que le fait de devoir faire évoluer un PGD au cours d’un projet peut renforcer les blocages.

De façon générale, il faut un changement culturel pour que tous les scientifiques adhèrent à la science ouverte. Il faut des échanges entre les différents acteurs impliqués dans le projet, entre eux et avec les personnels d’appui. Il faut faire connaître et reconnaître la légitimité, les compétences et le travail de ces personnels. A un autre niveau, le manque d’appui des tutelles, des directeurs d’unité, a été également souligné.

Parmi les suggestions d’amélioration, la mise en place de formations sur les PGD, sur les principes FAIR et la science ouverte pour les doctorants et les chefs de projet, ainsi que des ateliers de relecture de PGD a été mise en avant. Les Ateliers de la Donnée de Recherche Data Gouv devraient aussi permettre de faire passer le message et de formaliser les soutiens. Il faut mettre à disposition des supports, des fiches synthétiques, des questionnaires-types et, comme noté précédemment, des témoignages. Avoir un cadre commun, des outils de diagnostics permettant d’identifier les points clé de la gestion des données d’un projet, des modèles et des exemples concrets, des tutoriels, et prendre en compte le PGD dès le début de projet sont également essentiels. Il a été noté que la multiplicité des exemples disponibles, pas toujours de la meilleure qualité, peut être un obstacle, et qu’il faudrait identifier et mettre en avant des exemples de bonne qualité. La mise en place de badges reconnaissant les compétences dans le domaine de la science ouverte et l’identification de « champions des données » est suggérée. Enfin, la reconnaissance de l’activité et la nécessaire dotation en moyens humains et financiers ont souvent été mentionnées.

Les questions soulevées par les participants à la fin de la réunion ont concerné les prérequis pour la rédaction de PGD, comment motiver un chercheur alors qu’il ne conserve rien, le besoin de centraliser et de diffuser les retours d’expérience positive, de même que le besoin de conseils sur la déontologie, les licences, le partage de données. Le besoin d’accéder à des PGD évalués et de vérifier leur mise en œuvre réelle a été exprimé. Les inquiétudes liées au PGD actionnable (maDMP) ont été levées pendant la discussion. Enfin la préoccupation sur l’évolution des spécialistes de l’IST vers ces nouvelles activités en regard de leurs tâches antérieures a été formulée.

Un retour sur le webinaire et une compilation des réponses faisaient partie des suites souhaitées pour l’atelier. Nous les avons mis en place en diffusant ce billet de blog et la compilation associée. Un intérêt pour des retours d’expérience des participants et pour une liste de références et d’études a été également formulé. Dans cette optique, les participants ont été invités pendant l’atelier à partager la liste des ressources utiles dont ils avaient connaissance. La liste de ces ressources, très riche, est reprise dans la compilation.

Le besoin d’organiser un atelier concret sur le PGD, d’expliquer les principes FAIR, le droit des données et les responsabilités de leur gestion, ainsi que le fait qu’il serait utile de disposer d’« entrepôts de protocoles innovants de gestion des données » plutôt que de devoir les trouver dans les publications, ont également été cités.

Les échanges pendant les ateliers ont été jugés utiles par les participants, et il y a un réel intérêt pour rester en contact et avoir d’autres occasions de rencontre et de discussion.

 

Marie-Claude Deboin, CIRAD, DGDRS, Montpellier, France 

Françoise Genova, Université de Strasbourg, CNRS, UMR 7550, Observatoire Astronomique de Strasbourg, France 

Anne Sophie Bage,  INRAE, MICA, Rennes, France 

Paolo Laï, CNRS, INIST, Vandoeuvre-lès-Nancy, France

 

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